Le Pitch
Présentation de l'éditeur
Dans ce récit intime, Sophie Bessis livre sa Tunisie, toujours sienne malgré l'exil, et quelques souvenirs chers à son cœur : les années 70, les compagnons de route, leurs engagements communs, les chemins qui parfois se séparent… En elle, "juivarabe", combats politiques et attachement à la terre natale se joignent pour former son identité profonde, inaltérable, ferment de ses travaux.
Extrait
Je suis allée ramasser de la bruyère. C'est la saison. Le plateau en est rose, violet. En marchant, je me disais que la campagne est bien silencieuse. Quelques bruits d'oiseaux, le vent dans les arbres. La mer, elle, est si bruyante. Son ressac ne s'arrête jamais. En rentrant, j'ai cueilli des mûres en me piquant les doigts dans les ronces. C'est le moment de faire de la gelée, bien que ce soit une mauvaise année pour les fruits rouges.
Quand je suis arrivée ici, je ne savais pas à quoi ressemblait un frêne, ni un orme, ni un sureau. Maintenant, je sais que leurs feuilles sont d'un vert différent et qu'elles ne jaunissent pas en même temps, à l'automne. Je sais beaucoup de choses maintenant, couper du bois, faire prendre du premier coup un feu de cheminée, faire de la confiture de châtaignes.
Ici, je suis chez moi. Pas chez moi. C'est beau, presque intime désormais. Que man-que-t-il à ce presque ? Juste le rythme du coeur qui, ailleurs, s'accélère parfois devant le jaune d'un acacia dans un printemps précoce, quand le souffle tiède de l'air vous pénètre la peau. Pas de racines non plus. Donc on ne peut pas les arracher. De ce côté-là, je suis tranquille. Des fois, je hais le vert. Mes yeux se brouillent. Je vois du bleu, le blanc m'aveugle. Puis mon regard retrouve avec plaisir les paisibles couleurs de l'harmonie rurale. Le soir, il fait froid.
C'était il y a longtemps. A. m'annonçait l'imminence de la révolution, sans cependant oser en prévoir la nature. Serait-elle nationale démocratique ou prolétarienne ? Ma contribution à sa préparation était, à l'époque, assez modeste : transport de livres aux pages de garde truffées de comptes-rendus rédigés par les militants parisiens à l'intention de ceux de Tunis, impénitents gauchistes que le socialisme officiel avait bouclés au bagne, et même chose au retour, ceux du bagne écrivant à leurs camarades en exil. D'autres transportaient des stylos, également bourrés de dynamite épistolaire.
Quatrième de couverture
Dans ce récit intime, Sophie Bessis livre sa Tunisie, toujours sienne malgré l'exil, et quelques souvenirs chers à son cœur : les années 70, les compagnons de route, leurs engagements communs, les chemins qui parfois se séparent… En elle, "juivarabe", combats politiques et attachement à la terre natale se joignent pour former son identité profonde, inaltérable, ferment de ses travaux.
Biographie de l'auteur
Issue d'une famille de la grande bourgeoisie juive tunisienne, Sophie Bessis vit à Paris. Agrégée d'histoire, ancienne rédactrice en chef de l'hebdomadaire Jeune Afrique et du Courrier de l'Unesco, elle est actuellement directrice de recherches à l'Institut de relations internationales et stratégiques de Paris (IRIS) et secrétaire générale adjointe de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH). Elle est l'auteure de plusieurs ouvrages dont une biographie d'Habib Bourguiba (éd. Jeune Afrique, 1988). Dernières publications : L'Occident et les autres : Histoire d'une suprématie (éd. La Découverte, 2003) ; Les Arabes, les femmes, la liberté (éd. Albin Michel, 2007).