Par un ami d’Yvan Ilitch, une critique profonde et novatrice de notre monde "globalisé" et de son approche du développement.Pendant des millénaires, des modes de vivre et de produire ont prédominé dans les sociétés humaines, basés sur la simplicité et des rapports de convivialité avec son prochain. Femmes et hommes vivaient ainsi avec peu de choses : un "nécessaire" culturellement défini qui comportait deux volets : l’un, de nature économique, composé de ce qui suffisait plus ou moins pour subvenir à ses besoins physiques ; l’autre, de caractère social, qui provenait de l’enracinement de chacun dans un milieu solidaire social et naturel, composé de personnes et de choses sur qui ce dernier pouvait toujours compter. L’apparition de l’homo œconomicus, qui incarnait un tout autre idéal de vivre et de produire, basé sur une économie productiviste et la quête du profit individuel, produisit une rupture sans précédent d’avec le passé. Examinant les différentes catégories de pauvreté propres aux sociétés vernaculaires (pauvreté volontaire et pauvreté conviviale), force est de constater que la grande rupture produite par cette économie a entraîné à sa suite une rupture similaire non seulement dans la perception des besoins, mais aussi dans leur production. Une économie qui cherchait toujours à transformer la rareté en abondance s’est alors, elle-même, transformée en productrice majeure de raretés d’un genre nouveau : des besoins socialement fabriqués qui étaient, au surplus, bien plus orientés vers ceux de la croissance économique que vers l’éthique et les principes propres à la vie en commun. Tous ces changements ont abouti à l’apparition de la pauvreté modernisée, une condition toute nouvelle créée par la prolifération de ces besoins induits, accompagnée de l’impossibilité pour la plupart des humains de les satisfaire ; une condition directement liée à un système productif à deux faces qui produisait, pour la première fois, aussi bien l’abondance que la misère, soumettant la grande majorité de ses victimes à une version moderne de supplice de Tantale. Une des dimensions les plus effrayantes de cette économie est que, dans la pratique, elle a conduit tout le monde sans exception, à participer, directement ou indirectement, à la production de nouvelles formes de misère. A titre d’exemple, serait-il possible désormais, pour des humains qui chercheraient à ne pas se soumettre à la colonisation des besoins socialement fabriqués, de choisir d’autres modes de vie basés sur l’archétype de la pauvreté ? Ou, la production massive des nouvelles formes de misère aurait-elle déjà chassé toute pauvreté basée sur une "bienheureuse simplicité" ? Enfin, dans quelles mesures la résistance à l’hégémonisme de la logique binaire dominante (pour qui toute remise en question des notions du Progrès et de la croissance économique reviendrait à un "retour en arrière") ne ferait-elle pas partie de toute recherche sérieuse pour de nouveaux modes alternatifs de vie ? L’auteur, Majid Rahnema, fait ici une critique radicale et novatrice de notre monde "globalisé" où en dix ans le nombre des pauvres a augmenté de 74 millions en Afrique, et en un an de 1 million aux usa…Biographie de l'auteurNé en 1924 à Téhéran, Majid Rahnema a été diplomate et ministre, il a représenté l'Iran à l'ONU de 1957 à 1971.Également membre du Conseil exécutif de l’Unesco et représentant des Nations Unies au Mali, il s'est consacré pendant plus de vingt ans aux problèmes de la pauvreté.En tant qu'enseignant, il a officié à l'université de Berkeley et à celle de Claremont, en Californie, avant de s'établir en France après 1993, où il a enseigné à l'université américaine de Paris.Majid Rahnema a publié chez Actes Sud Quand la misère chasse la pauvreté (Actes Sud, 2003 et Babel, 2004) et La Puissance des
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