Le Pitch
Présentation de l'éditeur Le 6 août 1914, Henri Despeyrières, âgé de 21 ans, quitte Toulouse avec sa compagnie en direction des frontières de l'est. Durant les treize mois que dure sa guerre, il envoie régulièrement des lettres à ses parents, une famille de cultivateurs aisés de Montflanquin (Lot-et-Garonne). A peine sorti de l'adolescence, élevé dans un milieu catholique conservateur, il imagine partir pour une «grande aventure» et donner «une bonne rossée aux Prussiens». La découverte de la réalité des premiers affrontements est une épreuve traumatisante. Bientôt, il faut se résigner à une guerre qui semble de plus en plus absurde : «Que c'est malheureux de se tuer entre jeunes hommes», de «mourir à vingt ans», écrit Henri Despeyrières. Ce faisant, il annonce son propre sort puisqu'il figure parmi les disparus de son régiment, en Argonne, le 8 septembre 1915. Il est l'un des 250 000 soldats français dont on n'a jamais retrouvé le corps... Alexandre Lafon, en présentant les lettres d'Henri Despeyrières, revient sur les traces laissées par les combattants et sur l'écriture de leur expérience. Cette correspondance, témoignage brut non remanié, nous plonge dans la vie quotidienne d'un «homme dans la guerre», avec l'authentique sincérité et le courage poignant de ceux qui l'ont vécue. ALEXANDRE LAFON est professeur d'histoire et de géographie. Il prépare un doctorat, à l'université de Toulouse-Le Mirail, portant sur les notions de camarade et de camaraderie au front pendant la Grande Guerre. Membre du Collectif de recherche international et de débats sur la guerre de 1914-1918, il l'est l'auteur de plusieurs articles parus dans des revues scientifiques (notamment les Annales du Midi), et a écrit, avec la collaboration de Bertrand Soles, Agen et les Agenais dans la Grande Guerre (Alan Sutton, 2003). Extrait Extrait de la préface du Général André Bach, ancien chef du Service historique de l'armée de terre, vice-président du Collectif de recherche internationale et de débat sur la Première Guerre mondiale (CRID 14-18) : A-t-on le droit de faire des souvenirs subjectifs des combattants de la Grande Guerre une des sources de la recherche historique ? On constate l'intérêt pour les récits biographiques propres à faire communier le lecteur dans une émotion qui vient de l'identification aux malheurs décrits. Il existe aussi, dans un autre registre, une recherche combative des traces d'une histoire alternative, celles d'entités régionales ou autres, qui auraient été interdites d'histoire par l'État jacobin. Cette demande se fonde sur le soupçon que l'histoire officielle, aidée par l'université, occulte certains faits qu'il faut aller chercher dans les souvenirs de ceux qui n'ont pas eu accès au débat public. Enfin la demande sociale se nourrit de l'engouement pour la recherche des racines, qui se traduit par le développement de la généalogie. Celle-ci rencontre l'histoire par le petit bout de la lorgnette, avec le risque de faire émerger des réflexions anachroniques. Les traces écrites de la vie des combattants existent en grande quantité. Elles font revivre, au niveau individuel, tout ou partie de la guerre, selon que les acteurs-témoins y ont été appelés dès le début, en cours de route ou l'ont brutalement quittée par leur mort au front. Les survivants ont pu avoir diverses attitudes. Certains ont soigneusement rangé leurs carnets de route et classé les correspondances conservées, tandis que d'autres, après un certain laps de temps écoulé depuis leur retour à la vie normale, se sont décidés à mettre au clair leurs notes de guerre et ont essayé de transcrire ce qui les avait le plus marqués. S'ils l'ont fait, cela a été la plupart du temps le résultat d'une démarche personnelle pour fixer leur mémoire avant qu'elle ne défaille, sans objectif de s'en servir à l'extérieur pour témoigner. Ceux qui ont écrit n'ont pas attiré l'attention de leur entourage sur ce fait. S'ils ont parfois montré ce qu'ils avaient couché sur l