Le Pitch
Présentation de l'éditeur
«- Le gâteau est trop petit, disait-il, nous sommes affamés, si vous le partagez avec nous, il ne vous restera que des miettes. Ainsi résumait-il la question algérienne : pour accéder au gâteau, il fallait nous chasser ! Je n'acceptais pas ses propos d'un anticolonialisme primaire.
- Je veux bien admettre que la colonisation est intrinsèquement mauvaise, il n en demeure pas moins que nous sommes là et qu'il faudra faire avec nous. Nous ne sommes pas tous d'horribles colonisateurs. La majorité des pieds-noirs travaille avec le même dévouement, la même ferveur pour le bien de tous, indigènes et Européens.
- Nous voulons la liberté et l'honneur, Louise. Je pris ses mains :
- Pourquoi t'attaches-tu à moi, Kader ?
- Je ne sais pas... tu es belle et puis quelque chose en toi m émeut.
- Je suis belle comme la France et je t émeus comme la France !»
Alger sans Mozart est un roman choral, une partition à plusieurs voix. Celles de Louise et Kader ; celle de Sofiane, fils de l'Algérie nouvelle, hybride dont la vitalité redonne à Marc, le metteur en scène parisien cynique, créativité et goût de vivre, préfigurant ce que pourraient être les relations apaisées entre les deux rives de la Méditerranée, le Sud débordant irriguant le Nord blasé.
Alger sans Mozart est un hommage aux exilés. Un hommage à la douleur des pieds-noirs qui ont aimé ce pays, lui ont donné le meilleur d'eux-mêmes et l'ont quitté sans jamais trouver une reconnaissance. Un hommage à l'Algérie et aux Algériens écrasés par la destinée. Alger sans Mozart est une mosaïque qui met en lumière soixante ans de schizophrénie. La schizophrénie de deux pays qui refusent d'admettre leurs liens irrémédiables.
Ce roman écrit par un Algérien et un Français s'attache à reconstituer le puzzle si complexe de l'Histoire commune aux deux paya, Sans concession...
Les auteurs
Canesi & Rahmani, originaires des rives nord et sud de la Méditerranée, ont mêlé leurs souvenirs, leurs sensibilités islamo-chrétienne, leurs deux visions du monde méditerranéen et l'empreinte de leurs terres : la Corse et l'Algérie. Leur premier roman, Le Syndrome de Lazare (éditions du Rocher), parlait d'amour au temps du sida débutant, il a été adapté au cinéma par André Téchiné (Les Témoins). Avides d'explorer tous les genres littéraires, Canesi & Rahmani ont commis, en 2010, un thriller décalé, La douleur du fantôme (Phébus), profondément français, refusant de sacrifier à la mode ambiante américano-suédoise.
Ils s'attachent, dans chacun de leurs livres, à souligner la place de l'art dans nos vies : la peinture dans le Syndrome de Lazare, la danse et l'architecture dans la Douleur du Fantôme, le cinéma dans Alger sans Mozart.
Extrait
Louise
La tragédie de ma vie s'est jouée dans un décor somptueux.
Une ville si blanche qu'elle éblouit dans le soleil, si blanche qu'elle brûle les yeux de ses murs immaculés en procession immobile vers la mer, si blanche qu'elle boit, les jours de pluie, tout le ciel et sa lumière.
Des montagnes au loin encerclent la baie et ses collines, bleu sombre au printemps, enneigées l'hiver, obscurcies par les incendies d'été, elles sont frontières ; au-delà, le bled : terres arabes ou berbères, étendues hostiles et meurtrières. La mer, autre frontière, enchâssée dans une baie en cercle parfait, s'évanouit loin vers le nord. Tous les jours, je guette les bateaux qui nous lient à Marseille, à cette France étrangère et lointaine, à ce pays qui s'éloigne chaque jour un peu plus, oubliant qu'autrefois son coeur battait ici.
Face à ma fenêtre, je me souviens...
Des femmes voilées de blanc, assises à même le sol, près de l'église Saint-Charles, main droite recroquevillée, extraite de haïks sales et déchirés, honteuse de quémander.
Fatma - mais s'appelait-elle vraiment Fatma ? - la vendeuse de dioul, accroupie sur une marche d'escalier, de ceux qui descendent très raides du boulevard Saint-Saëns à la rue Michelet, ses feuilles de brick posées sur un l