Renvoyé de son lycée, Quentin est placé dans un lycée bourgeois du centre-ville. D'origine beaucoup plus modeste que ses nouveaux camarades de classe et loin de ses amis d'enfance, le garçon se sent étranger, exclu. Dans sa classe de première L, la majorité des élèves suit les cours de théâtre de Mme Fernandez, la professeur de français.
Rapidement fasciné par cette femme charismatique, Quentin va se laisser convaincre et intégrer le cours d'art dramatique pour incarner Tom, le héros de La Ménagerie de verre, la pièce de Tennessee Williams.
Quentin accepte progressivement de baisser la garde, de remettre en cause ses propres préjugés et se familiarise peu à peu avec les codes de ce nouveau milieu... Il se rapproche de ses partenaires de jeu, d'Heathcliff, jeune dandy solitaire, et de Julie, dont le charme ne le laisse pas longtemps indifférent. Mais, de plus en plus absent pour ses proches, Quentin se sent tiraillé entre deux mondes. Ce malaise latent fait écho à la pièce de Tennessee Williams et, entre la vie et les répétitions du spectacle, l'acteur et son personnage, les frontières tendent à s'abolir. Finalement, un seul choix s'impose à Quentin : celui de faire du théâtre sa vie.
QUESTIONS À JEAN-PHILIPPE BLONDEL :
Dans «Double jeu», l'expression artistique est une étape déterminante pour le héros, et l'occasion d'une reconstruction de lui-même. Ce sujet semble être une thématique essentielle dans vos romans pour adolescents («(Re)play !, Brise-glace»...). Comment commenteriez-vous cette facette de votre écriture ?
La découverte de soi à travers l'expression artistique est effectivement au centre de mes préoccupations dans mes romans, parce que je l'observe chez mes élèves - qui révèlent une partie d'eux souvent insoupçonnée des adultes quand ils se lancent dans l'artistique (le slam, la musique, la danse, le théâtre) -, et aussi parce que cet élément a une résonance autobiographique certaine : je me suis construit par l'écriture, elle m'a stabilisé. Elle m'a aidé à survivre dans les moments de tempête. Elle m'a permis de me comprendre et de comprendre les autres, et le monde autour de moi. Trouver l'expression artistique qui permet l'épanouissement me paraît central - encore plus à l'adolescence, qui à la fois a besoin de cadres et d'intimité. Il n'y a guère que l'art qui permette de faire coexister une subjectivité et un format.
Dans votre roman «Double jeu», le contexte social est particulièrement marqué. Il met en scène un adolescent en décalage, en hésitation entre deux mondes. Quelles raisons vous ont poussé vers cette voie ?
Une fois de plus, c'est un faisceau d'éléments : beaucoup d'observation face aux injustices sociales subies par certains de mes élèves (au lycée, elles sont cachées mais prégnantes, notamment dans les choix d'orientation) et une part autobiographique indéniable (l'accès à la culture quand on vient de la petite classe moyenne provinciale et qu'on a grandi dans les années 1970 n'est pas une évidence, et la "montée" à Paris révèle les manques et les inadéquations). Mais ce qui m'intéresse avant tout, c'est de construire des ponts, entre les univers, les classes sociales, les gens, la littérature jeunesse et la littérature générale. Quentin Silber est un de ces ponts. J'espère en être un aussi. Je trouve que c'est beau, d'être un pont - de se faire rouler dessus, soit, mais d'amener les autres d'un point à un autre, plus loin, plus avant...
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