Le Pitch
Présentation de l'éditeur « De livre en livre, Lobo Antunes affine sans cesse un langage d'une puissance inouïe qui fait de la douleur d'individus égarés au bord d'eux-mêmes le symbole même de la condition humaine. » Hugo Pradelle, La Quinzaine littéraire « Il faut entrer [dans l'écriture d'António Lobo Antunes] et s'y laisser couler. Le rythme, alors, vous hante dès que vous y avez goûté. » Florence Noiville, Le Monde des livres « Lire la prose du plus grand écrivain portugais est une expérience rare, dérangeante et captivante à la fois. Comme un rêve éveillé. Comme entrer dans les ténèbres de Faulkner ou de Virginia Woolf. » Bruno Corty, Le Figaro Extrait 21 mars 2007 De la fenêtre de l'hôpital à Lisbonne ce n'étaient pas les gens qui entraient ni les voitures entre les arbres ni une ambulance qu'il voyait, c'était le train par-delà les pins, des maisons, d'autres pins et la montagne dans le fond avec le brouillard qui l'éloignait de lui, c'était l'oiseau de sa peur sans branche où poser tremblotantes les lèvres de ses ailes, la bogue d'un châtaignier auparavant à l'entrée du jardin et aujourd'hui au-dedans de lui que le médecin appelait cancer et qui grossissait en silence, dès que le médecin l'a appelée cancer les cloches de l'église ont entonné le glas et un cortège s'est étiré en direction du cimetière avec une bière ouverte et un enfant à l'intérieur, d'autres enfants en tenue de séraphin assurant la garde du cercueil, des gens dont il ne remarquait que le bruit des souliers et donc pas des gens, des semelles et des semelles, quand sa grand-mère sur le mur avec lui a renoncé à se signer il a senti l'odeur des compotes dans l'office, des pots de fleurs sur chaque marche de l'escalier et comme les pots de fleurs intacts il ne s'est absolument rien passé, il s'en est fallu de peu, étendu sur le brancard à la sortie de l'examen, qu'il ne demande au médecin - Il ne s'est absolument rien passé n'est-ce pas ? et il ne s'est absolument rien passé vu que les pots de fleurs intacts, sa grand-mère qui est morte depuis tant d'années là vivante à côté de lui, son grand-père décédé depuis encore plus longtemps en train de lire le journal avec son sonotone, le silence de son grand-père l'a alarmé tant et si bien que la bogue s'est dilatée dans ses tripes l'écorchant, lui faisant mal, je la pose sur un bloc de granité, je tape dessus à coups de marteau et la maladie écrabouillée, quelqu'un qu'il ne distinguait pas poussait son brancard le long du couloir, il remarquait la pluie, des visages, des enseignes, la gouvernante de monsieur le vicaire sous l'appentis tandis qu'il pensait - C'est mon cercueil qu'ils sont en train de pousser lui offrant du raisin - Veux-tu du raisin mon petit ? et disparaissant aussitôt, ne pas se rappeler le nom de la gouvernante de monsieur le vicaire l'a préoccupé, il se rappelait son tablier, ses mules, son rire, il ne se rappelait pas son nom et parce qu'il ne se rappelait pas son nom il n'allait pas guérir, son grand-père a replié son journal sur le canapé et n'a même pas eu un regard pour lui, il a voulu demander - Vous ne pouvez rien faire pour moi ? et tout ce qu'il pouvait attendre c'était au mieux la conque de la main autour de l'oreille - Quoi ? et les sourcils unis en direction de personne - Qu'est-ce qu'il a dit ? Revue de presse Résumer ce grand livre est presque un outrage : Au bord des fleuves qui vont (les fleuves mythiques, les fleuves du Portugal, les torrents d'émotions qui coulent en nous, les fleuves de la mémoire et du temps) raconte quinze jours de M. Antunes à l'hôpital de Lisbonne, où il est opéré d'un cancer, «la bogue». Rien de plus, et cependant c'est dans un océan, un abîme, une forêt touffue, en vérité dans une tête d'homme, que pénètre le lecteur... Et ce roman de son agonie devient le roman de la vie... Tout est mouvant. Aussi excitant et épuisant que le Céline de Guignol's band, Lobo Antunes se mérite. Il est artiste et pas raisonneur. Son matériau n'