Le Pitch
Présentation de l'éditeur
Héros de la Deuxième Guerre mondiale, brillant conseiller du sénateur du Tennessee et heureux en ménage, Walter Selby menait une vie droite et sans histoires. Jusqu'au jour où tout a basculé. Un drame, la déchéance, et désormais, pour son fils, Frank, de terribles interrogations... Pourra-t-il un jour comprendre, admettre et même pardonner le crime de son père ? Mêlant avec virtuosité tragédie familiale et tableau de l'Amérique contemporaine, Le roi est mort est une puissante réflexion sur la nature et la force des liens filiaux.
«Jim Lewis parvient à tout dire dans ce roman foisonnant : l'anecdotique et l'essentiel, l'intime et la marche du monde. Ajoutez à cela une écriture éblouissante et vous avez le roman le plus inconvenant et le plus intelligent qu'on puisse lire sur notre monde.»
Christine Ferniot, Lire
Né en 1963 à New York, Jim Lewis est critique d'art et journaliste. Il est l'auteur de trois romans : Sister, Quand on aime son bourreau (Balland, 2003) et Le roi est mort. Jim Lewis vit aujourd'hui au Texas.
Extrait
PRÉLUDE
Il y eut un jour une femme qui s'appelait Kelly Flynn. Fille d'un banquier dublinois, elle naquit en Irlande en 1720 mais passa son enfance à Londres, où son père était parti solliciter un emprunt auprès du roi. Elle rencontra à la cour d'Angleterre un fourreur belge qui s'appelait DeLours et l'épousa. Ensemble ils eurent neuf enfants, dont six moururent, quatre de maladie et deux lors d'accidents. L'un des survivants, Henry (né en 1745), un garçon intrépide, abandonna ses études pour s'engager dans l'armée, où il fut nommé officier.
L'Empire britannique, alors en pleine expansion dans le sous-continent indien, avait grand besoin d'hommes ingénieux. Henry DeLours était intelligent et courageux; il fut envoyé à Calcutta. Lors de son séjour, il rencontra Elizabeth, fille d'un officier anglais. Il l'épousa, et ils engendrèrent cinq enfants. L'une des filles, Mary (née en 1770) fut envoyée au pensionnat en Angleterre.
Lors d'un voyage en Cornouailles, Mary fit la connaissance d'un homme plus âgé, un imprimeur du nom de Samuel Crown, qui conçut de l'admiration pour elle, lui fit la cour, et obtint bientôt sa main. Ils partirent pour Londres et eurent comme enfants, à un an d'intervalle, William, Théodore, Olivia et Georgia. Les garçons devaient reprendre le commerce de leur père mais dès qu'il fut en âge, Théodore (né en 1790), un garçon volontaire et aventurier, s'embarqua pour l'Amérique dans l'espoir d'y faire fortune.
Il fut quelque temps clerc dans un office notarial à New York. Chaque soir, de retour dans sa petite chambre sombre, il écrivait à sa mère la foi qu'il avait en son avenir, mais aussi les obstacles qu'il rencontrait au quotidien : les dettes, le mépris de ses employeurs, l'angoisse qu'il éprouvait dans cette ville neuve et étrange. Néanmoins, grâce à son côté économe, il amassa bientôt une petite somme qui lui permit d'acquérir quelques acres dans le Kentucky. Il y planta du tabac, laboura, prospéra, et au bout de quelques années, il possédait près de trois cents acres et deux douzaines d'esclaves. À l'âge de trente ans, il était devenu assez important pour se présenter aux élections de juge local, et grâce à quelques tonneaux de whisky livrés par ses soins dans les tavernes la veille du scrutin, il fut élu.
C'était alors l'année 1820, et le juge Crown n'avait pas d'épouse. Il se rabattit donc sur une femme noire, une esclave du nom de Betsey, qui travaillait chez lui. Il la faisait venir presque chaque soir dans son lit -Apollon ne me pardonnera peut-être pas, mais Pan certainement, écrivit-il dans son Journal - et elle mit bientôt un enfant au monde, un garçon à la peau marron clair nommé Marcus (né en 1821).
Durant l'enfance de Marcus, sa mère lui raconta que son père était esclave dans une maison voisine, mais à l'époque déjà, le garçon avait eu vent de la rumeur disant qu'il était issu de son maître. La cuisinière ricanait à