Le Pitch
Présentation de l'éditeur
Ils ont menti. Ils mentent encore.
Depuis des décennies, ils trompent les juges, manipulent les médias, trahissent les électeurs. Une seule drogue : le pouvoir. Et l’argent qui va avec. Ils forment un clan, une poignée d’hommes shootés à la politique, à l’affut d’un siège, d’une élection.
Cette bande, c’est celle de l’ex-RPR, de Patrick Balkany à Jacques Chirac, de Nicolas Sarkozy à Charles Pasqua. Un homme les a beaucoup fréquentés, aidés parfois. Il en a payé le prix, bon soldat, parfait exécutant des basses œuvres dans les Hauts-de-Seine, le bastion, le Fort Knox du mouvement gaulliste. Il connaît leurs secrets les plus inavouables. Cet homme de l’ombre, c’est Didier Schuller, l’ancien conseiller général de Clichy-la-Garenne.
Longtemps il s’est tu, lui aussi a dupé les juges. Mais aujourd’hui, il parle.
Voici ses confessions, explosives. Il a fallu cinq ans aux auteurs pour recueillir ses déclarations, puis les conforter par des investigations poussées, en France, en Suisse, en République dominicaine ou au Liechtenstein. Et mettre des noms sur la French corruption…
Extrait
Extrait du prologue
Le petit village d'Oberhaslach, niché à l'est du département du Bas-Rhin, à une poignée de kilomètres de la frontière allemande, disparaît dans un brouillard presque inquiétant, en ce début du mois de décembre 2012. C'est tout juste si l'on distingue les reliefs des Vosges. L'aube s'est à peine levée que, déjà, le vieux 4x4 s'enfonce dans la forêt toute proche, là où se trouve la chasse partagée par Didier Schuller et quelques voisins. «Si vous voulez avoir une chance de voir les animaux, il faut ouvrir grand les vitres», intime le conducteur d'une voix rauque trahissant le fumeur invétéré. Frigorifiés, on s'exécute. Au volant, le fidèle Heicko, garde-chasse, comme son frère. Comme son père surtout, longtemps au service du dignitaire nazi Hermann Göring.
Drôle de carte de visite.
Visage buriné, Heicko, qui fit aussi profiter de ses talents un autre amateur de gibier, François de Grossouvre, l'âme damnée de François Mitterrand, est plutôt du genre taiseux. Sur la réserve. Fiable aussi. Il connaît son Schuller sur le bout des doigts. Une grande complicité fondée sur une confiance réciproque totale lie les deux hommes depuis trente ans. Au bout de quelques minutes, Heicko secoue la tête négativement. «Avec ce redoux, les animaux ne se montreront pas, vous ne verrez rien aujourd'hui», tranche-t-il. Le type connaît plutôt bien son affaire. Une heure passée à arpenter les sentiers escarpés de la forêt de Haslach n'y fera rien. Pas le moindre sanglier ou cerf à l'horizon.
Retour à la coquette maison louée par Didier Schuller à l'année, à la lisière des bois. Il vient s'y ressourcer, dès qu'il en a le loisir. Moins pour tuer le gibier que pour le pister, l'observer, l'admirer, être en contact avec cette nature dont il ne peut se passer. Il s'esclaffe. Bruyamment, comme souvent. «À chaque fois que je retrouve Heicko, je me revois ratisser avec lui fébrilement la forêt, à la recherche de mon argent disparu...»
Cette anecdote, Schuller la porte en lui depuis plus de vingt ans. Il avait failli la révéler dès 2002, dans l'espoir de contribuer à faire élire Lionel Jospin contre Jacques Chirac, mais un imprévu nommé Le Pen l'en avait dissuadé.
Peu importe.
Il savait qu'un jour, l'opportunité de la rendre publique se présenterait. Et qu'il la saisirait. Non pas pour se délivrer d'un fardeau, mais plutôt parce qu'une histoire pareille, on ne la garde pas pour soi. À elle seule, elle constitue un saisissant raccourci de ce dont Didier Schuller fut le témoin toutes ces années où, pour les décideurs qu'il côtoyait, politique rimait avec fric. Lorsque vient enfin pour lui le temps de la narrer, devant un verre de gewurztraminer vendanges tardives, le bien nommé, son visage s'illumine, une lueur presque enfantine traverse son regard.
Nous sommes en 1990. La droite se prépare déjà à revenir au pouvoir, ce