Le Pitch
Présentation de l'éditeur
Morwenna Phelps, qui préfère qu'on l'appelle Mori, est placée par son père dans l'école privée d'Arlinghurst, où elle se remet du terrible accident qui l'a laissée handicapée et l'a privée à jamais de sa soeur jumelle, Morganna. Là, Mori pourrait dépérir, mais elle découvre le pouvoir des livres de science-fiction. Delany, Zelazny, Le Guin et Silverberg peuplent ses journées, la passionnent.
Un jour, elle reçoit par la poste une photo qui la bouleverse, où sa silhouette a été brûlée. Que peut faire une adolescente de seize ans quand son pire ennemi, potentiellement mortel, est une sorcière, sa propre mère qui plus est ? Elle peut chercher dans les livres le courage de combattre.
Ode à la différence, journal intime d'une adolescente qui parle aux fées, Morwenna est aussi une plongée inquiétante dans le folklore gallois. Ce roman touchant et bouleversant a été récompensé par les deux plus grands prix littéraires de la science-fiction : le prix Hugo et le prix Nebula. Il a en outre reçu le British Fantasy Award.
Née au pays de Galles, Jo Walton vit depuis 2002 au Canada avec son mari et son fils. Elle est l'auteure d'une dizaine de romans remarqués. Bien que son roman Tooth and Claw, inédit en français, ait reçu le World Fantasy Award en 2004, il lui a fallu attendre la parution de Morwenna pour rencontrer le succès qu'elle mérite.
Extrait
JEUDI 1er MAI 1975
L'usine Phurnacite d'Abercwmboi avait tué tous les arbres à des kilomètres à la ronde. Nous avions mesuré avec le compteur de la voiture. On l'aurait dit sortie des profondeurs de l'enfer, sombre et menaçante, avec ses cheminées cracheuses de flammes se reflétant dans une mare noire qui tuait tout animal qui se risquait à y boire. La puanteur était indescriptible. Nous remontions les vitres de la voiture au maximum quand nous devions passer par là et essayions de ne pas respirer, mais Grampar disait que personne ne pouvait retenir sa respiration si longtemps, et il avait raison. Dans cette odeur se mêlaient le soufre, produit de l'enfer, comme chacun sait, et bien pire, des métaux innommables surchauffés et de l'oeuf pourri.
Ma soeur et moi appelions cet endroit Mordor, et nous n'y étions encore jamais allées seules. Nous avions dix ans et étions donc de grandes filles, mais, dès que nous avons commencé à la regarder, à notre descente du bus, nous nous sommes donné la main.
C'était le soir et, plus nous approchions, plus elle se dressait noire et terrifiante. Six de ses cheminées étaient éclairées ; quatre crachaient une fumée délétère.
«Certainement une ruse de l'Ennemi», ai-je murmuré.
Mor n'avait pas envie de jouer. «Tu crois vraiment que ça va marcher ?
- Les fées en sont sûres, ai-je répondu de mon ton le plus rassurant.
- Je sais, mais par moments je me demande ce qu'elles comprennent au monde réel.
- Leur monde est réel, ai-je objecté. Il est juste différent, c'est une question de point de vue.
- Oui.» Elle ne pouvait détacher les yeux de l'usine, de plus en plus grosse et effrayante à mesure que nous approchions. «Mais je me demande d'où elles voient notre monde. Et c'est incontestablement le nôtre. Les arbres sont morts. Il n'y a pas une fée à des kilomètres à la ronde.
- C'est pour ça que nous sommes là», ai-je dit.
Nous étions arrivées à l'enceinte, trois rangées de fil de fer, dont seule la plus haute était barbelée. Une pancarte y était accrochée : «Accès interdit. Attention aux chiens.» L'entrée était loin de l'autre côté, hors de vue.
«Il y a des chiens ?» a demandé Mor. Elle en avait peur, et ceux-ci le sentaient. Des toutous parfaitement gentils qui jouaient avec moi se hérissaient devant elle. Ma mère disait que c'était un moyen permettant de nous distinguer l'une de l'autre. Le pire était que cela aurait pu marcher mais, venant d'elle, c'était, comme souvent, inadmissible, impraticable et légèrement extravagant.
«Non, ai-je dit.
- Comment le sais-tu ?
Quatrième de couverture
Morwenna Phelps, qui préfèr