Le Pitch
Revue de presse
Apparemment, avec Mr Phillips, son second roman, John Lanchester, auteur du réputé Le prix du plaisir - couronné par le Trask Award et le prestigieux Whitbread Prize du premier roman - change de cap. Fini les digressions goûteuses de Tarquin Winot, son héros gastronome un rien foutraque. Place au normal, au banal, à lanodin, au modeste homme de tous les jours, à savoir Mr Phillips expert comptable de profession, la cinquantaine, marié et père de deux enfants.
Ce lundi matin et comme a priori tous les lundis matins, Mr Phillips sadonne donc à lune de ses activités fétiches : lévaluation de ses rêves. Quel en est le degré dérotisme ? Y-a-t-il adultère virtuel ? Que faire si le rêve devenait réalité et sil rencontrait en chair et en os la très sexy Clarissa Colingford, vedette du petit écran ? Une fois ces dilemmes reportés au prochain sommeil, prêt pour sa journée de labeur, le voici qui prend le train de banlieue en direction de Londres. Mais ce matin-là, Mr Phillips ne se rendra pas à son travail car la veille du week-end il sest vu congédié sans tambour ni trompette par lentreprise qui lemployait depuis un quart de siècle !
Une nouvelle quil na pu se décider à annoncer à sa famille. Malgré la journée étrange qui soffre à lui, sans but sinon celui de tuer le temps en mimant une occupation, Mr Phillips ne modifie pas son comportement. Et pourtant cest cette fois les yeux grands ouverts quil sengage sur le trajet de sa destination forclose. Après une visite au parc avec station prolongée devant le cours de tennis où quelques jupes courtes saffolent de-ci de-là et où il est accosté par le Rédacteur en chef dune revue porno, il se rend au musée où une femme un peu extravagante cherche sa compagnie. Puis à nouveau errance, promenade, visite à son fils aîné dans le quartier de Soho etc. Ce paisible père de famille découvre le monde qui lentoure sans crainte, toujours pourvu dun bon sondage à portée desprit pour lui rappeler quil fait partie dune majorité que son récent statut de chômeur ne parvient pas à bouleverser. Ainsi toute la journée, Mr Phillips quête-t-il les signes de sa conformité au monde que ne pourrait lui ôter la découverte dune vie quil ignore et la perte de son travail.
De ce personnage, arrimé à lassurance de sa banalité, John Lanchester fait le héraut de notre enfermement. Sil mime la désinvolture, aussi bien au niveau du style que de lhumour noir et désinvolte, cest que lécrivain sapproche dune ligne de fracture tragique
Pris au piège du hold-up dune banque, Mr Phillips se relèvera malgré linjonction contraire des braqueurs, acte héroïque autant que suicidaire, acte symbolique de lhomme qui déjà atteint dans sa dignité par son licenciement, refuse dêtre couché au sol - qui plus est au milieu de crottes et détritus que les talons citadins colportent sur les moquettes. En apprenant son récent chômage, les policiers transigeront en faveur de lacte suicidaire car les destitués du monde du travail «réagissent de façons très différentes.(
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) les gens font de ces choses (
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) quils ne feraient pas dans leur état normal». Et les «Eyes wide shut» de la normalité, Mr Phillips aimerait bien ne pas les avoir quittés
En se promenant dans ce que Mr Phillips «pense» ou «évite de penser» le lecteur sent émerger peu à peu le simulacre de vie que nous désigne John Lanchester
le retour au réel nest pas sans quelques dégâts ! --Sylvaine Jeminet -- Urbuz.com
Présentation de l'éditeur
Mr. Phillips, c'est vous, c'est moi, l'homme de la rue, le "petit homme" de Gogol, que rien ne distingue de ses voisins - ni ses préjugés, ni ses tabous, ni ses phobies, ni ses fantasmes - et qui voit soudain le ciel lui tomber sur la tête le jour où l'entreprise qu'il a diligemment servie pendant plusieurs décennies le licencie sans cérémonie. Ce Monsieur-Tout-le-Monde, à la cinquantaine bedonnante, va mettre à profit sa première journée d'oisiveté forcée pour s'offrir une promenade dans le Lo