Le Pitch
Présentation de l'éditeur Près de vingt ans après la fin de l'Union soviétique, il reste encore des dissidents. Condamnée à mort en 1983 pour "haute trahison d'État", Renata Lesnik en est le vivant exemple. Ses crimes ? Être passée à l'Ouest en bernant le KGB et avoir révélé dans Ici Moscou, son premier livre, le vrai visage du régime. Avec Mariée au KGB, en femme libre, elle nous livre enfin ses Mémoires et dévoile un pan largement méconnu de l'Histoire récente. Avec sa verve sans égale, son humour ravageur - sans idéologie ni pathos - elle évoque sa résistance au sein d'un système totalitaire et son quotidien à travers une URSS digne de Kafka. Passionnant thriller politique, la vie de Renata - toujours sur le fil du rasoir - prend littéralement le lecteur aux tripes. Intransigeante, courageuse et authentique, elle s'est affirmée comme l'un des plus brillants experts de la Russie post-soviétique, sans jamais accepter le compromis. Toujours traquée, cette réfugiée politique en France est devenue, aux yeux de certains, un témoin gênant. Qui a peur de la Vérité ? Qui a peur de Renata Lesnik ? Politologue et criminologue, Renata Lesnik est réfugiée politique en France depuis 1981. Elle publie dès 1982 un livre intitulé «Ici Moscou», chez Hachette Par la suite, elle co-signe avec Hélène Blanc, du CNRS, nombre d'ouvrages majeurs, dont leur dernier opus «Les prédateurs du Kremlin» (1917-2009), au Seuil, en 2009. Extrait HISTOIRES À COUCHER DEBOUT Mon nom de famille est Lesnik. En russe, il signifie «garde-forestier». Et je ne peux m'empêcher de penser que ma venue au monde en pleine forêt moldave ne fut pas le fruit du hasard. Tard dans la nuit du 2 au 3 août 1949, le premier hurlement maternel brise net le murmure des feuillages. Immédiatement, grand-père Parféné surgit sur le seuil. Montre au poignet et carabine au poing pour tout vêtement. Hirsute, Agafia, sa fille aînée, s'encadre dans la fenêtre. Deux minutes plus tard, à cru sur son cheval, elle galopait à bride abattue vers le village pour quérir la sage-femme... Au fond de la prison où il croupissait pour avoir injurié publiquement «les Soviets et ce Satan de Staline», mon père fut le seul à grincer des dents : il aurait voulu un fils ! Par la suite, Papa se rendra compte que sa fille valait largement un garçon. Et même plusieurs. À huit mois, je prends ma première cuite. J'avais dû ramper à quatre pattes jusqu'à l'antre où grand-mère Xénia cachait son alambic. Comme toute villageoise moldave qui se respecte, elle fabriquait de l'alcool artisanal : un tord-boyaux qui rendait les sacs-à-vin du patelin - des pros du goulot - marteaux comme s'ils venaient d'avaler une faucille. La pauvre femme m'a surprise dans son sanctuaire à rouler sur moi-même en chantonnant d'une drôle de voix rauque. J'empestais l'alcool à des verstes, mais une seule idée l'a bouleversée : «Le Diable est en elle !» Le lendemain, sans souffler mot à âme qui vive, grand-mère m'a emmenée en ville pour me faire baptiser. Sans interdire expressément le baptême, l'athéisme «combattant» ne l'encourageait guère. En outre, à l'instar des autres enseignants, mes parents se devaient de donner l'exemple. Surtout avec papa qui moisissait en prison !.. Revue de presse Cela pourrait être un polar. Acide et amusant. Qu'y a-t-il de plus classique que cette intrigue où la femme mariée découvre que son mari n'est pas celui qu'elle croyait ? Il la surveille et l'épie. Mais voilà, ce n'est pas si simple. Cela se passe en Russie, mieux en Union soviétique, à l'époque où le communisme, on le sait aujourd'hui, était déjà déclinant. L'étrange va donc le disputer à l'exotisme sur 400 pages. On croit rêver quand l'épouse découvre comment son mari, qui s'avère être un agent - apparemment de haut rang - du KGB s'infiltre dans sa tête... Le livre est un témoignage d'une société qui n'est plus. Fait de petits détails de la vie quotidienne et de ces anecdotes qui rendent les dictatures plus intelligible